Communication du 3 novembre 2020
Suite aux dernières mesures édictées par le Conseil fédéral, différentes faîtières actives dans les milieux culturels ont exprimé leurs inquiétudes et questionnements.
Ces prises de position s’inscrivent dans un contexte où les aides promises mettent du temps à être délivrées. Certaines demandes d’indemnisation déposées au mois de mars n’ont pas encore été traitées à ce jour. Par ailleurs, la mise en œuvre du nouveau train de mesures, adopté le 14 octobre, risque de prendre encore du temps, alors que de nombreuses structures et artistes sont déjà au bord de la faillite.
Nous appelons à ce que ces aides soient calculées sur des pertes de gain et de revenus basées sur les années précédentes et non sur des événements annulés, puisque malheureusement la plupart des événements ne sont même plus à l’état d’annulation mais bien à celui de non-planification.
Il faut rappeler ici que depuis le 16 septembre, les indépendant·e·s et les personnes dont le rôle est assimilable à celui d’employeur·euse au sein de leur structure ne touchent plus de perte de gain.
Nous sommes inquiètes et inquiets face à la limite d’accueil du public à 50 personnes. Cette baisse de jauge vient se greffer sur des structures et sur des équipes déjà à l’agonie suite aux mesures qu’elles ont dû tricoter et détricoter depuis mars. Dans certains cantons, les lieux de culture sont à présent fermés, dans d’autres ce n’est pas (encore ?) le cas. Ces spécificités cantonales rendent le travail des faîtières extrêmement ardu. Les coûts financiers et humains que ces mesures imposent sont énormes pour des petites et moyennes structures dont la viabilité économique dépend largement des recettes de la billetterie, sans parler des recettes liées à la vente de boissons qui sont exclues de la plupart des événements. Rappelons encore, que bon nombre d’artistes, évoluant dans les musiques actuelles par exemple, n’étaient pas éligibles à des aides et que toute une partie du dommage ne sera pas quantifié au final.
Pourquoi communiquons-nous aujourd’hui de manière conjointe, alors que tout a déjà été dit ?
Parce que, malgré nos différences et des réalités pouvant être radicalement opposées, nous ne souhaitons pas céder à la tentation de nous opposer les un·ne s aux autres.
En effet, ces mesures, jugées comme arbitraires couplées à des moyens qui n’arrivent pas, et qui, dans certains secteurs laissent littéralement des personnes sur la paille, n’ont pas la même incidence financière que l’on soit une grande institution hautement subventionnée ou une petite structure recevant des aides ou non pour des projets qui n’auront pas lieu. Les budgets et les plans de financement ne sont pas uniformisés dans le milieu de la culture ; par contre le sentiment qui traverse autant les petites salles que les grands théâtres, les indépendant·es que les prestataires de service, est, sans aucun doute celui de l’injustice. Les structures culturelles se sont adaptées à la situation, ont mis en place des plans coûteux en ressources, ont passé des mois à faire rentrer des carrés dans des ronds, en y arrivant souvent, parfois. Si personne ne remet en question le besoin de prendre des mesures, la manière de faire, et l’adaptabilité des consignes sont peu comprises.
Ce qui reste c’est un sentiment d’injustice et d’abandon et aussi une grande fatigue.
Une fatigue accumulée à force de plans, A, B, C et maintenant D. Un découragement, peut-être même des reconversions ?
Personne ne parle de l’impact des mots et des images sur le public. Qui souhaite encore aller au théâtre, au cinéma, voir un concert ? La culture est faite de liens, de partages, de plaisir. L’essence même de ce qui constitue notre métier est mise à mal, devons-nous poursuivre nos activités et à quel prix ?
Alors que le contexte nous pousse à changer de métier, de direction dans notre vie, nous réitérons notre slogan, la culture est notre métier, ce n’est pas un hobby, ce n’est pas un écran dont on peut changer la résolution d’un pouce sur une télécommande.
Enfin, nous saluons les responsables des villes et des cantons qui soutiennent notre démarche, certains ont parlé de « cynisme » au regard des décisions du Conseil fédéral.
Nous demandons donc que notre secteur, nos métiers, nos compétences soient reconnus.
Nous demandons à ce que les lieux puissent recevoir des indemnisations totales ou partielles en fonction du programme qu’ils arrivent quand même à développer- une mesure plus flexible qui ne décourage pas complètement la structure mais qui lui permette d’avancer sereinement et de s’adapter.
Nous demandons que tout soit mis en place pour maintenir les emplois et garantir une force de travail qui sera là lorsque que la crise sanitaire se dissipera.
Nous appelons la Confédération à prendre des engagements forts et à assumer sa responsabilité vis-à-vis des sacrifices et de l’effort qu’elle impose à la totalité de notre secteur.